3.3. L’Europe est-elle attractive ?
Dans quels pays souhaiteriez-vous vivre ? Dans quels autres ne souhaiteriez-vous pas vivre ? Cette question a été posée en 2009 à des étudiants du monde entier par les chercheurs du projet EuroBroadMap. Elle permet de s’interroger sur le degré d’attraction qu’exercent les villes et pays d’Europe sur une main-d’œuvre qualifiée dont les entreprises européennes ont de plus en plus besoin.
Lorsque l’on examine les réponses d’étudiants de grands pays émergents (Brésil, Russie, Inde, Chine), on peut dire que l’Europe de l’Ouest était encore en 2009 le pôle mondial le plus attractif dans les représentations du Monde des étudiants.
Mais cette image positive de l’Europe est fragile car elle repose en partie sur des clichés ou des stéréotypes. Beaucoup d’étudiants chinois et indiens perçoivent en effet l’Europe comme un lieu de loisir raffiné plutôt qu’une puissance économique ou une autorité morale. Cette image positive se dégrade encore plus lorsqu’il est question de migrations et de frontières. Pour beaucoup d’étudiants étrangers, l’Europe est perçue aussi comme une vieille puissance déclinante, frileusement repliée sur elle-même. Quitte à tenter sa chance, autant le faire dans des pays neufs et ouverts à l’immigration tels que le Canada et l’Australie !
Parmi les 75 millions de migrants présents dans les pays de l’OCDE en 2005, environ un tiers (24 millions) avaient opté pour un pays européen. L’attraction migratoire de l’Europe prise au sens large demeurait donc importante à la veille du déclenchement de la crise économique mondiale, même si elle s’exerçait sur les pays voisins, sur l’Afrique francophone ou lusophone et, à un moindre degré, sur l’Amérique latine. D’ores et déjà, l’Europe apparaissait peu attractive dans la plupart des pays d’Asie, d’Amérique du Nord et du Proche-Orient. Son influence serait bien moindre si chaque pays européen était considéré séparément des autres et menait une stratégie migratoire autonome. Si l’on prend l’exemple de l’Ukraine, on peut voir que les pays de l’UE représentent collectivement plus de 50 % des migrants. Mais cet avantage collectif disparaît si l’on raisonne pays par pays : c’est alors la Russie qui apparaît comme la destination principale (34 %). Même chose pour la France, qui envoie 68 % de ses migrants vers l’Union européenne mais dont les États-Unis sont la première destination. Ces cartes montrent ainsi le contraste entre la puissance collective d’une Europe unie et la faiblesse d’une Europe désunie.